Réussite à l’École, réussite de l’École

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Travaux et auditions
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Le CESE adopte son avis
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Comment lutter, véritablement, contre les inégalités scolaires, comment rendre concrète la réussite de tous les élèves
et favoriser le vivre-ensemble ? Pour répondre à ces questions, le Conseil économique, social et environnemental a adopté son rapport et son avis "Réussite à l’Ecole, réussite de l’Ecole", rapporté par Bernadette Groison (Groupe Alternatives sociales et écologiques), au nom de la commission Éducation, culture et communication.

 

L'avis "Réussite à l’Ecole, réussite de l’Ecole" a été adopté en séance plénière le mercredi 25 juin 2024 à 98 voix pour, 1 contre et 27 abstentions.

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Quel contexte ?

L'École est à l’image de notre société actuelle : fracturée et inégalitaire. L'âge d'or d'une école égalitaire est un mythe, tout comme l’idée que l'École puisse corriger, à elle seule, les aspects les plus négatifs de la société. 

La dernière enquête PISA de 2023 montre que le niveau moyen des élèves français est comparable à celui des autres pays de l'OCDE. Mais cette moyenne cache des écarts importants entre les meilleurs élèves et les moins bons, écarts qui s’accentuent de plus en plus.

 

Près de 6 Français sur 10 considèrent que l’école ne donne pas les mêmes chances à tous et toutes 
Sondage Ifop, mai 2023
 

Aujourd'hui 79% d'une classe d'âge obtient le baccalauréat contre 1 élève sur 3 en 1980 ; une personne sur deux est titulaire d'un diplôme de l'enseignement supérieur. Le niveau de connaissances, de compétences et de qualification s'est donc accru. Le niveau moyen des élèves est en France comparable à celui des autres pays de l'OCDE mais ce tableau cache des disparités importantes

 

Ainsi, il existe une forme de filiarisation ségrégative : 70% des enfants d'ouvriers ont un baccalauréat professionnel ou technologique et 75% des enfants de cadres obtiennent un baccalauréat général. Le parcours scolaire et l'orientation des élèves sont surtout déterminés par leur origine sociale. 

 

Les études montrent que deux facteurs sont déterminants dans la réussite scolaire : les conditions de vie des élèves et le capital culturel dont ils disposent dans leur environnement. Or les inégalités sociales et culturelles sont fortes dans notre pays. 

 

La réussite à l'École se définit comme la possibilité de réussir un parcours scolaire choisi et  en ayant pu  bénéficier de tous les outils pour devenir un citoyen capable de comprendre le monde et d'y agir pour faire société. La réussite de l'École est la capacité de la société à éduquer et à former aujourd'hui les personnes qui demain assureront les métiers, les engagements pour répondre aux besoins de la société.

 

Le principe d'égalité des chances est trompeur : il n'assure pas l'effectivité du droit à l'éducation ni à la réussite de l'élève. Il met en demeure l’élève d'assurer lui-même sa réussite. Le CESE préconise de parler de la réussite de tous les élèves car il revient à l'École de les accompagner pour parvenir à la réussite. 


On ne transforme pas l’école sans les acteurs

 

Changer l’École se fait en co-construction avec tous les acteurs. C’est pourquoi la commission Éducation, culture et communication s’est appuyée, pour cet avis, sur de nombreuses contributions des actrices et acteurs de terrain.  

Cette volonté d’associer celles et ceux qui font l’École au quotidien s’illustre dans cet avis par la diversité des personnes rencontrées : élèves, représentant.es de parents d’élèves, personnels de l’éducation, élu.es, représentant.es d’associations…

 

Les participants de la journée délibérative sur l'école qui lèvent la main

Crédits photo : Katrin Baumann / CESE

 

Le projet d’avis s’appuie sur de nombreux échanges menés par la commission Éducation, culture et communication avec des citoyennes et citoyens rencontrés dans les territoires, lors de déplacements dans des établissements scolaires

 

▶️ Regarder le reportage du déplacement à Paris

▶️Regarder le reportage du déplacement à Yvetot

▶️ Regarder le reportage du déplacement à Marseille

 

Onze Conseil économique, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) ont également contribué, ainsi que de la Délégation aux Outre-mer du CESE. 

Ces échanges, ont donné lieu à une journée délibérative pour prendre en considération les recommandations émises, lesquelles ont été intégrées dans les préconisations du projet d’avis. 

▶️ Regarder le reportage de la journée délibérative


Répartis en petits groupes de travail les participants à la journée délibérative ont pu construire des propositions et les prioriser. À l’issue de la journée, une mise en commun des travaux a été réalisée dans l’hémicycle du CESE pour partager et restituer les réflexions des différents groupes. Plusieurs thématiques ont été abordées : la qualité du temps scolaire et du bien-être à l’Ecole, les conditions de la réussite scolaire et la lutte contre les inégalités scolaires et la valorisation des métiers de l’éducation.

 

Avec cet avis, le CESE souhaite que soit engagé un changement de paradigme pour l'École. Il appelle à un débat démocratique pour en redéfinir les finalités et engager les transformations nécessaires pour assurer la réussite de toutes et tous. Ce choix nécessite une articulation entre les politiques scolaires et les autres politiques publiques (logement, transport, culture...).  L’École doit être un lieu qui permette à chaque jeune de se construire, de surmonter ses difficultés, d'apprendre et, d'imaginer le monde de demain pour faire société ensemble. 


Les préconisations pour une École de la réussite pour toutes et tous

 

Les préconisations du Conseil économique, social et environnemental s'articulent autour de 4 axes :

1.    Redéfinir les finalités de l'École

Pourquoi ? Les réformes se multiplient pour tenter de répondre aux nombreuses difficultés qui traversent le système éducatif, sans réelle évaluation des résultats obtenus. Il faut collectivement clarifier et déterminer les finalités que sont celles de l’École aujourd’hui.
Comment ? En organisant un débat démocratique (convention citoyenne, états généraux…) associant tous les acteurs de la communauté éducative et tous les publics ;
Il faut aujourd'hui garantir les moyens et de meilleures conditions de scolarisation des élèves, de la maternelle au lycée pour assurer la réussite de tous les élèves.

2.    Favoriser l’égalité et la mixité dans les territoires

Comment ? Mettre en place un plan pluriannuel pour réduire la ségrégation sociale et pour réduire, de plus de 30 %, les écarts des Indices de Position Sociale (IPS) entre les établissements scolaires, qu’ils soient publics ou privés au sein d’un même territoire ;
Réviser la carte scolaire et celle de l’éducation prioritaire pour prendre en compte l’évolution des territoires en s’appuyant sur l’indicateur de position sociale ;
Installer, partout, des observatoires de la mixité sociale et scolaire et de la réussite éducative, au niveau national et territorial, pour proposer un état des lieux et un diagnostic et faire des recommandations.

3.    Conforter les acteurs de la communauté éducative 

→ Comment ? Organiser une concertation avec les acteurs de la communauté éducative pour améliorer les conditions de scolarisation des élèves en réfléchissant par exemple : aux effectifs par classe, aux temps de transport, aux aides aux devoirs, à la restauration, à la santé physique et psychique, à l’accès aux soins, à l’organisation des emplois du temps, à la pédagogie différenciée, à faire classe dehors et penser l’école hors les murs, à l’aménagements des espaces, etc.

Mettre en place un « espace-parents », de façon obligatoire, dans toutes les écoles et établissements scolaires, à l’usage des parents d’élèves et de leurs délégués.

Renouveler la formation initiale des enseignantes et des enseignants pour sécuriser une entrée progressive dans le métier et mettre en place des plans de formation continue véritablement centrés sur leurs besoins, individuels et collectifs.

 

4.    Reconnaitre et valoriser tous les personnels qui contribuent au service public d’éducation 

Comment ? Déployer un plan d’urgence de recrutement des enseignantes et des enseignants des premier et second degré ;
Voter une loi de programmation de revalorisation des rémunérations des enseignantes et des enseignants ;
Impulser un plan de recrutement et de revalorisation des personnels non enseignants de l’État et des collectivités territoriales.

 

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Retour sur la séance plénière

 

« Nous prenons le parti de défendre la réussite de toutes et tous qui est à l'opposé de l'égalité des chances. Pourquoi ? L'égalité des chances semble une belle promesse mais elle est trompeuse car elle n'assure pas l'effectivité du droit à l'éducation. Elle essaie certes d’offrir les mêmes conditions à chacun et chacune mais elle met chaque élève en demeure d'assurer lui-même sa réussite. » a ainsi introduit Bernadette Groison.


 Lors de la présentation de l'avis en séance plénière, plus personnes se sont succédées à la tribune pour intervenir. Notamment Ines Bouchaut-Choisy (Groupe Outre-mer), pour présenter  la contribution de la délégation aux Outre-mer :

 

« En Guyane et à Mayotte, le constat montre un nombre d’enfants non-scolarisés particulièrement important. L’UNICEF a rappelé récemment que le droit à l’éducation représente « un défi particulier » en Outre-mer tant il faut concilier promesse républicaine et différenciation territoriale. »

 

Ce sont onze Conseil économique, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) qui ont contribué aux travaux du CESE sur l'École. Michèle Perrin, du CESER Centre-Val de Loire est intervenue pour rappeler que : « D’importants leviers de réussite se trouvent dans les territoires, ce qui rend très pertinent d’associer les Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux à ce travail »

 

Deux élèves de lycée et une élève de collège ont également pris la parole pour témoigner. 

« L'École fait de moi ce que je suis et je suis reconnaissante pour tout ce qu'elle m'a apporté. L'École est créée pour nous, pour les générations suivantes, qui construiront le monde de demain. » Laure, élève de terminale.

 

C'est sur le témoignage poignant de deux professeures des écoles venues de Marseille que la présentation de l'avis s'est clôturée. Elodie Rondot, a détaillé ce que signifie être enseignant en France aujourd'hui :

 

« Être enseignant aujourd'hui en France, à Marseille, ou ailleurs, où la vie dans les quartiers est aussi difficile que chez nous, c'est se sentir utile pour nos élèves et leurs familles. »

 

« Il est urgent d'envoyer un message positif sur le rôle de l’École et d'espoir à tous les jeunes. » a conclu Bernadette Groison.

 

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