Se loger dans les territoires pour exercer une activité saisonnière
Tourisme, hôtellerie-restauration, animation socioculturelle et sportive, agriculture… De nombreuses activités nécessitent une main d’œuvre importante sur certaines périodes de l’année pour une courte durée. Le recrutement de travailleurs est indispensable pour l’économie des territoires qui dépendent d’activités saisonnières. De fortes disparités traversent ces territoires, qui possèdent chacun leurs singularités.
Les préconisations ont été présentées par Catherine Lion (Groupe Agriculture), au nom de la commission Territoires, agriculture et alimentation. Mme Dominique Faure, Ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité, était présente et intervenue lors de la séance plénière.
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Les difficultés d'attractivité du travail saisonnier
Le recrutement de salariés saisonniers en nombre suffisant et avec les compétences requises est de plus en plus difficile. Cette difficulté de recrutement est multifactorielle. Parmi les difficultés recensées : manque d’attractivité du métier lié à certaines conditions de travail souvent difficiles, niveau de rémunération parfois faible, mais aussi la difficulté à trouver un logement qui apparaît comme un obstacle majeur. En effet, offrir des solutions de logement satisfaisantes est déterminant pour recruter des saisonniers et donc pour assurer la pérennité d’une activité économique, essentielle dans les territoires concernés.
Traiter la question du logement des salariés saisonniers implique d’abord de connaître leurs besoins quantitatifs et qualitatifs, et donc de savoir combien et qui ils sont. Selon l’Insee, l’emploi saisonnier, destiné à répondre à un accroissement local et temporaire de l’activité économique, a représenté plus de 4 millions de postes en 2017.Ce type d’emploi occupe 2,5 millions de personnes, ce qui signifie que chaque saisonnier a en moyenne près de deux contrats par an.
Ces données statistiques, recueillies et traitées par l’Insee, permettent d’avoir une vision globale quant à la situation de l’emploi saisonnier en 2017. Toutefois, il s’agit d’une étude ponctuelle et il s’avère a priori impossible de disposer de tels éléments au fil du temps afin de pouvoir suivre les évolutions au niveau national. De nombreuses données existent, notamment via des études sectorielles et régionales, mais elles sont insuffisamment agrégées et diffusées.
Le logement pour les travailleurs saisonniers: des solutions qui rencontres des difficultés de mise en œuvre
40% des candidats à un emploi saisonnier dans le tourisme habitent loin ; faute de logement 100 000 ne concluent pas de contrat.
- l’absence au niveau central de l’État et à l’échelon territorial, d’une instance clairement identifiée chargée de piloter et de coordonner les politiques en matière de logement des saisonniers ;
- une forte concurrence pour l’accès au logement entre les saisonniers et les touristes, dans les territoires fortement marqués par la saisonnalité, en particulier en montagne et sur le littoral ;
- une inadéquation entre offre et demande. Ainsi, les zones où sont situés des logements vacants sont rarement celles où sont employés un nombre significatif de saisonniers ;
- une modification des normes qui ont été progressivement instituées pour garantir des conditions satisfaisantes d’hébergement adapté aux besoins des salariés saisonniers ;
- la sobriété foncière qui se concrétise par l’objectif du Zéro Artificialisation Nette (ZAN) à l’horizon 2050, introduit par la loi Climat et Résilience d’août 2021, exige de privilégier la rénovation et la réhabilitation de l’existant ainsi que la réutilisation des friches même si incontestablement des besoins de construction existent. En effet, dans de nombreux territoires ruraux, les possibilités de rénovation ou de réhabilitation de bâtiments existants, situés à proximité des exploitations agricoles, sont très limitées ;
- la non-reconnaissance du logement pour les saisonniers qui n’est ni un meublé de tourisme, ni une location en résidence principale à l’année ;
- la dimension financière, donc le modèle économique des projets, qui constitue un paramètre déterminant à la fois pour les saisonniers ainsi que pour les employeurs et les autres porteurs de projet.
De nombreuses solutions innovantes existent dans les territoires
Dans son projet d'avis, le CESE s'est intéressé à deux sortes d’espaces caractérisés par l’Agence nationale de la cohésion des territoires dans sa récente typologie, basée sur des critères démographiques, économiques et géographiques :
- les ruralités productives, dont les habitants actifs sont majoritairement des ouvriers ou des travailleurs du secteur agricole ;
- les ruralités touristiques qui sont éloignées des pôles d’emplois et présentent, hors activités saisonnières, une faible densité de population permanente.
Pour le CESE les spécificités locales appellent des solutions adaptées à chaque contexte. Des initiatives innovantes existent au sein des différents territoires, c'est pourquoi la commission Territoires, agriculture et alimentation a souhaité les identifier.
« La question de l’hébergement des saisonniers se traite essentiellement au niveau local et il y a beaucoup d’initiatives sur le terrain » explique la rapporteure de l'avis.
Pour recenser des exemples des solutions de logements, une plateforme participative a été lancée permettant de recueillir les facteurs de succès et les difficultés rencontrées.
En parallèle, la commission Territoires, agriculture et alimentation s’est également déplacée sur le terrain, à Rennes, pour s’inspirer des initiatives déployées à l’échelle locale et mesurer l’importance des différents freins existants.
Plusieurs Conseils économique, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) ont également contribué à l’avis pour apporter un éclairage territorial, indispensable sur le sujet du logement des travailleurs saisonniers ou en mobilité.
Pour Catherine Lion, « dans chaque territoire concerné par l’activité saisonnière (touristique et agricole) les acteurs trouvent déjà des solutions innovantes, en particulier les collectivités locales. ».
Une stratégie nationale pour le logement des travailleurs saisonniers qui accompagne les initiatives des acteurs des territoires
Les préconisations du CESE
→ Par qui ? En identifiant un délégué interministériel du logement saisonnier chargé de coordonner l’élaboration d’une stratégie nationale ;
→ Comment ? En confiant un rôle de coordination aux régions (Président du Conseil régional et Préfet de Région) pour organiser la synergie entre les différents acteurs, y compris sur les mobilités, et mettre en œuvre le droit à expérimenter des solutions innovantes adaptées aux spécificités locales.
→ Comment ? En rendant éligible les logements des travailleurs saisonniers ou en mobilité aux mêmes aides et dispositifs applicables aux logements permanents (comme MaPrimeRénov’) ;
En régulant mieux les meublés de tourisme dans les zones tendues ;
En favorisant la remise sur le marché des logements vacants.
→ Pourquoi ? Les projets collectifs permettent une mutualisation des solutions, par exemple : la mobilité, l’intermédiation… Ils peuvent être portés par des associations ou des groupements d’employeurs. Cette mutualisation doit se faire entre différents publics et de manière intersectorielle. Cela permet de répartir les charges financières et donc de renforcer la viabilité économique des projets.
→ Comment ? En encourageant les aides aux projets collectifs de logements d’actifs en mobilité, multi-filières ou multi-publics. En favorisant la coordination inter-secteurs, en particulier au niveau des groupements d’employeurs, et en valorisant le dialogue social pour mettre en place des solutions de logement innovantes.
💡Un nombre important de salariés saisonniers ignorent quels sont leurs droits et les dispositifs, y compris d’aides financières, dont ils peuvent bénéficier.
→ Une solution : Généraliser la diffusion de vadémécums adaptés aux publics visés avec l’objectif de réduire les taux de non-recours aux aides existantes. Mieux répertorier et diffuser en temps réel les offres de logements disponibles pour les salariés saisonniers et organiser la mise en relationLa rapporteure
Retour sur la séance plénière
Une intervention de Madame la Ministre chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité
Mme Dominique Faure, Ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité, est intervenue lors de la séance plénière.
Un table ronde de témoignages du terrain
Une table ronde a été organisée pour témoigner d'actions mises en œuvre dans différents territoires et secteurs d’activités avec :
- Mme Muriel Abadie, Vice-présidente de la région Occitanie en charge du Tourisme durable, des loisirs et du thermalisme, maire de Pujaudran (Gers)
- Mme Sabine Ferrand, restauratrice, représentante du CESER Centre-Val de Loire
- M. Olivier Mugnier, Délégué général de la Fédération Nationale des Coopératives de Consommateurs, ancien membre du CESE