Cannabis : sortir du statu quo, vers une légalisation encadrée : le CESE a adopté son avis

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Le CESE se prononce en faveur d’une légalisation encadrée des usages dits « récréatifs » du cannabis
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Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté ce jour en séance plénière son projet d’avis intitulé « Cannabis : sortir du statu quo, vers une légalisation encadrée ». 

Ce projet d’avis a été rapporté par Florent Compain (Groupe Environnement et Nature) et Helno Eyriey (Groupe des Organisations étudiantes et des mouvements de jeunesse) au nom de la Commission temporaire « Cannabis » présidée par Jean-François Naton (Groupe CGT). Il a été présenté lors de l’assemblée plénière du 24 janvier 2023.

Il a été adopté avec 87 voix pour, 25 voix contre et 16 abstentions.

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Des pistes concrètes pour faire évoluer la réglementation en vigueur

Malgré la mise en place d’un système de prohibition depuis plus de 50 ans, un des plus répressifs d’Europe, la France est le pays de l’Union européenne qui compte en proportion le plus de consommateurs et de consommatrices de stupéfiants, avec 45 % des 15-64 ans qui ont déjà̀ consommé du cannabis au moins une fois au cours de leur vie, contre 27 % dans l’ensemble de l’Union européenne, selon l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. 

Actuellement, les politiques publiques en vigueur peinent à atteindre les objectifs de santé et de sécurité publique qui leur étaient assignés initialement en 1970. C’est pourquoi le CESE a souhaité se saisir de cette thématique dans un rapport et avis, qui s’appuie sur une analyse transversale des usages dits « récréatifs » du cannabis, et propose des pistes concrètes d’évolution de la réglementation en vigueur.

Faire évoluer la législation français vers une légalisation encadrée

Fort d’une analyse complète de la situation en France grâce à l’audition d‘experts de terrain, et face à l’exemple de plusieurs pays comme le Canada qui ont déjà fait évoluer leurs cadres légaux vers la légalisation, le CESE propose dans son avis de sortir du statu quo et de faire évoluer la législation française vers une légalisation encadrée des usages dits « récréatifs »du cannabis. Il préconise trois types de mesures destinées à faire évoluer durablement le cadre répressif actuel vers un modèle d’encadrement souhaitable :

Des mesures d’urgence pour protéger les personnes mineures et limiter les injustices

Le CESE souhaite la mise en place d’une véritable politique publique de prévention et de réduction des risques spécifique au cannabis, intégrée à l’ensemble des conduites addictives, et recommande un renforcement de la répression du trafic visant directement les mineurs, en mobilisant si nécessaire l’assistance éducative judiciaire, et en créant des structures d’accueil et de soins spécifiques.

Le CESE propose de ne plus sanctionner pénalement l’usage et la culture du cannabis à titre personnel, et préconise de revoir le dépistage du cannabis au volant, en sanctionnant uniquement l’emprise, et en développant l’étude scientifique et l’opérationnalité de la mise en œuvre des tests comportementaux.

Organiser un large débat sociétal pour construire un nouveau modèle d'encadrement du cannabis

En parallèle à ces mesures d’urgence, organiser un débat large et dépassionné au sein de l’ensemble de la société visant à construire un nouveau modèle d’encadrement du cannabis à usage dit « récréatif » 

Le CESE propose, dans son avis, la mise en place de ce débat au sein la société en permettant une participation large et une appropriation par le plus grand nombre des enjeux sanitaires, sociaux, économiques et environnementaux d’un nouvel encadrement législatif du cannabis.

Une refonte totale de la législation

Le CESE propose une refonte totale de la législation afin de pérenniser la mise en place d’un modèle souhaitable de légalisation encadrée de la production, de la distribution et de l’usage dit « récréatif » du cannabis

Le CESE préconise de déployer une politique publique de prévention, de réduction des risques, d’éducation à l’usage et de soin en développant une stratégie protectrice d’ampleur en particulier envers les publics jeunes notamment les personnes mineures via une politique d’accompagnement et de prise en charge des usages à risques.

Le CESE recommande de réguler la production de cannabis en permettant la coexistence de différents modèles de production via la séparation des filières médicales, utiles et « récréatives », en faisant de l’agriculture biologique la norme en matière de production, tout en encadrant le volume ou les surfaces consacrés à cette culture, et en assurant une traçabilité complète et transparente de la graine à la consommation grâce à une « blockchain » publique, sous contrôle des services de l’État.

Le CESE propose de réguler la distribution de cannabis en l’autorisant aux seules personnes majeures dans des points de vente dédiés soumis à licence, en soumettant les distributeurs à une formation obligatoire à la prévention et la réduction des risques actualisée régulièrement, et en assurant l’affichage obligatoire des taux des principaux cannabinoïdes et des profils aromatiques aux cotés de messages préventifs de santé publique.

Le CESE propose de réguler l’usage de cannabis dit « récréatif » en l’autorisant uniquement aux personnes majeures tout en ayant une attention particulière pour celles âgées de 18 à 25 ans, en orientant les usagers mineurs vers une commission d’accompagnement éducative et thérapeutique composée de spécialistes plutôt que de pénaliser leurs consommations, en orientant et accompagnant les consommateurs et consommatrices vers des usages à moindres risques, et en réparant les injustices sociales engendrées par le trafic de cannabis. 

Le CESE propose de créer une taxe spécifique affectée à la prévention et au soin, de financer la recherche sur le cannabis, ainsi que la réhabilitation des quartiers et l’accompagnement des personnes qui ont subi les conséquences du trafic en vue du développement de l’économie locale.

Le CESE préconise de développer une politique de sécurité et de contrôle de la qualité́ des produits, de la provenance et des modes de culture. L’objectif poursuivi consiste également à renforcer la répression des trafics, en particulier en direction des personnes mineures, et en protégeant les lieux de production, de transformation et de distribution.

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